Pour écrire cette lettre, je fouillerai dans mon imaginaire mais aussi dans ma réalité ordinaire.
Les fonds recueillis lors de ce Téléthon, que tout le monde peut suivre à la télé, servent à aider les personnes handicapées de la région. On comprend bien que les donneurs et les receveurs vivent ensemble sur ce vaste territoire. On suppose que si les donneurs se massaient d'un bord d'un chemin et les receveurs de l'autre bord, en face... Il y aurait une belle bulle de tendresse au-dessus de ce chemin.
Car la plupart du temps, les donneurs ne connaissent pas les receveurs... et vice-versa.
Je suis l'une des personnes qui reçoivent les services de la Ressource : je suis une vieille dame à l’approche de 70 ans, obèse morbide, handicapée, en fauteuil roulant, donc pauvre et enfargée dans les nombreuses actions à faire pour vivre bien dans ma maison. Qu'on pense simplement à faire l'épicerie à chaque semaine. Une grosse expédition.
Après avoir fait un séjour en gériatrie active au CHSLD des Eskers à Amos et un séjour de plusieurs mois à l'hôpital parce que des bactéries mangeuses d'os colonisaient mon genou droit (douleur intense) ... le séjour en CHSLD était bienvenu si je voulais retourner et rester le plus longtemps possible à la maison.
J'ai subi plusieurs interventions chirurgicales qui m'ont laissé des séquelles troublantes, dont des problèmes endocriniens et une accentuation du diabète. Ablation de l'hypophyse, dose massive d’antibiotiques spéciaux pour tuer les bactéries de source nosocomiale dans mon genou. Maintenant, je suis revenue à la maison à La Motte, avec l'aide du CLSC et de la Ressource. Cette dernière m'a aidée à avoir un fauteuil roulant, un déambulateur, une marchette et un quadriporteur avec lequel je peux aller au village, l'été, ou lire au bord du quai municipal, rouler dans ma cour arrière voir pousser les arbres qui portent les prénoms de mes petits-enfants. J'ai reçu aussi, une toilette-bidet car je n'ai plus la capacité de l'hygiène corporelle pour essuyer les endroits souillés lors des allers aux toilettes. Ce qui arrivent souvent car je suis devenue incontinente sévère (selon moi la plus difficile de mes limitations). Impossible d'aller à un spectacle sans faire des dégâts et mourir de honte... impossible d'aller voir des ami-e-s sans trembler. J'imagine les scénarios les plus difficiles mais possibles : tout à coup je dois aller aux toilettes et si je suis incapable de m'essuyer. ???
Comme je suis incontinente et obèse, j'ai besoin de couches-culottes spéciales qui coûtent sans jeu de mots « la peau des fesses » Il me serait impossible de payer ces couches-culottes et les piqués de nuit, sans risquer la faillite. De simples objets pensez-vous ? Erreur, quand on a besoin de 8 couches-culottes par jour et au moins deux piqués pour sauvegarder le matelas du lit d'hôpital. Lit offert pour étirer mes jambes en hauteur afin d'aider la circulation sanguine et combattre les ACV toujours possibles. Car mon cœur fonctionne seulement à 40%.
Aller faire l'épicerie hebdomadaire est une saga inimaginable, comme je vous disais. Heureusement que je trouve quelqu'un pour m'aider à insérer le fauteuil roulant dans le coffre arrière de l'auto du bon samaritain (c'est lourd et ça prend beaucoup d'espace). La Ressource m'a offert quelques argents pour aider à payer l’essence pour les déplacements de ce bénévole.
Quel que soit mon quotidien, je sais que je peux compter sur la Ressources pour m'aider quand je suis coincée. Comme un ami bienfaisant... ce qu'il est vraiment grâce à vos dons. L'administration d'un tel organisme et du Téléthon exige la participation d'une foule de bénévoles dont vous êtes peut-être et aussi les prestations des artistes de la scène qui se produisent à la télé lors de l'évènement. Les bénévoles vivent certainement un beau moment car ils reviennent à chaque année et les montants recueillis sont de plus en plus spectaculaires. Grâce à votre travail, nous les personnes handicapées pouvons souvent pallier à nos limitations. Mon fauteuil roulant remplace mes jambes. La pince de préhension remplace mes doigts pour ramasser un papier ou un livre par terre. J'arrive à reprendre une pilule sous la table et la remettre sur mon napperon avec ces doigts mécaniques. Je jubile à chaque fois.
Comment dire merci à vous les bénévoles et les donneurs, de la part de toutes les personnes handicapées de la région ? Si vous pouviez être dans notre cœur pour ressentir la joie que vous nous donnez !!! Cette joie se mêle aux larmes et aux douleurs anciennes pour laver nos vies... Cela n'a pas de prix. Il y a cette confiance et cette espérance installées à demeure dans notre âme. Cela n'a pas de prix non plus. Tous ces éléments permettent de développer des endroits sans limitation pour nous. Nous sommes de vrais humains qui sans les yeux, qui sans les jambes, qui sans les mains... continuons de vouloir multiplier ces endroits précieux. Notre cœur vibre à l'unisson avec le vôtre. Acceptez notre gratitude.
Margot Lemire
La Motte